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lui-même. Ce fut d’un ton posé qu’il la questionna :

— Tu as fait un bon voyage ?

— Oui papa, avec Augustin.

L’ombre d’un sourire vint aux lèvres du marin au souvenir de la silhouette falote de l’ancien soldat.

— Il va bien, le brave garçon ?

— Très bien.

Et, s’enhardissant, Charlette posa son beau regard attendri sur son père, considérant les cruels symptômes de maladie répandus sur les traits ravagés du malheureux.

— Et vous, père… votre santé ?

Il ne répondit pas à son interrogation, ses yeux cherchant ceux de Charlette, fixes et inquisiteurs.

— Pourquoi ne me tutoies-tu plus, Charlette ? fit-il lentement.

Elle devint pourpre, balbutiant :

— Moi, papa ?

Ce « vous » lui était échappé sans qu’elle s’en aperçût. Mais, à présent qu’elle y réfléchissait, il lui semblait que jamais plus elle ne pourrait employer l’affectueux et familier tutoiement de jadis envers cet homme qui, pourtant, éveillait en elle la plus profonde pitié, l’amour le plus tendre.

D’ailleurs, il n’insista pas, et, désormais, ce fut chose tacitement admise que seul il la tutoyât.

Le chocolat apporté, Charlette l’avala avec l’appétit que la jeunesse conserve même au milieu des