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Cette réponse arracha au comte une sourde exclamation de colère qu’il accompagna même d’un léger coup de poing sur la table. Mais une seconde après, le visage illuminé par un bon sourire, il déclara au milieu du silence général :

— Eh bien ! je regrette beaucoup de ne pouvoir y aller.

Quelques années plus tard, Rubinstein, l’illustre pianiste et compositeur russe, donnait à Moscou un de ses derniers concerts, et comme pour Sarah Bernhardt on s’arrachait les billets. Tolstoï était un de ses plus fervents admirateurs. Il plaçait Rubinstein au premier rang des musiciens qu’il avait entendu jouer. Mais l’auteur de Qu’est-ce que l’art ? ne pouvait oublier que le célèbre virtuose ne représentait pas l’art populaire, le « seul vrai » et le comte ne prit pas de billet pour le concert. Nous le crûmes fermement résolu à ne pas y assister ; aussi notre surprise fut-elle grande