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Pour moi surnage encor dans ces rochers sans nombre,
Où j’ai failli laisser ma vie en son printemps,
Attiré sur ces flots par le calme des vents
Je n’avais pas encore à l’élément liquide
Confié mon jeune âge, et sur son bord humide
Quoique né ; sur les eaux du perfide élément,
Je n’avais égaré que mes yeux seulement,
Et jamais sur la vague, en nacelle légère,
Je ne m’étais sous voile éloigné de la terre,
Mon essai (l’on va voir), fut des plus malheureux.

Un jour déjà bien loin, un soleil radieux,
Faisait étinceler l’onde toujours mobile,
Promettant, semblait-il, une course facile,
Pour aller tout d’un trait à l’autre bord de l’eau,
Où se dessine au loin un très-vague coteau :
Et ce jour entre moi et des amis d’enfance,
Était de bon accord convenu à l’avance,
Pour tenter de concert voyage à l’Étranger,
Car tel était pour nous, sur mer un jour entier.
Je pensais, de danger ne prévoyant pas l’ombre,
Qu’avant que le soleil se soit plongé dans l’ombre,
Je pourrais dire : Enfin je ne suis plus enfant ;
J’ai bien osé franchir un bras de l’Océan.