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Nous eurent séparé du port qui sembla fuir.
De beaux vaisseaux à l’ancre et tout prêts à partir
Nous attendaient avant de déployer leurs voiles.
Nous y montons joyeux : déjà de larges toiles
S’appuyaient aux haubanes, n’attendant que l’autel,
Pour l’immolation du Fils de l’Éternel.
Soudain cinquante mains à l’envi s’empressèrent.
Blanches nappes, bouquets, festons se déployèrent :
Et tout un temple enfin, sanctuaire flottant,
S’improvisa sur l’onde au Dieu du firmament.

Tout est prêt, voilà que le célébrant s’avance,
En cercle à deux genoux la pieuse assistance,
Entonne eleison, Seigneur, ayez pitié !

Énergique clameur ! chant aux vagues jeté !
Ô combien j’ai trouvé dans ta courte formule
De touchants sentiments ! et comme à l’incrédule,
Tu réponds noblement, en accents pleins de foi,
En deux mots tu traduis tout le naïf effroi
Du matelot chrétien se confiant à l’onde,
Et partant sur le flot, pour parcourir le monde.
Commentons-le ce cri : Prenez pitié, Seigneur !

Commandez que jamais la tempête en fureur