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du Nord ; » elles s’entendaient à décrire un jeune guerrier aux cheveux à l’enfant, une lance à la hampe souple et solide, une cotte de mailles aux anneaux inflexibles, un casque à la bombe étincelante ; elles savaient vanter une incursion heureuse, les noms des vainqueurs, les noms des aïeux et les longues lignées des familles reliées par une généalogie précise aux noms les plus anciens et aux premières hordes descendues en Arabie.

Ce n’étaient pas seulement des femmes savantes en légendes et dans les choses pratiques que je viens de signaler ; elles étaient aussi les mères des familles, les ménagères des tentes, les conservatrices et les surveillantes des troupeaux ; elles savaient, outre la préparation du pain, cette invention, disent les Arabes, qui est dûe au terrible Nemrod, comme celle du savon est due au grand Salomon, elles savaient les ressources culinaires des peuplades errantes, de peuplades de déserts, ressourcés toujours restreintes et chétives chez des hommes qui vivent entre le soleil et le sable, et qui attendent les pluies rares de leurs solitudes brûlées, afin que des pâturages trop incertains donnent de quoi faire remplir les mamelles des brebis et des chamelles.

En ces siècles antéislamiques, les plus splendides festins étaient simples et de chère mesquine ; c’étaient les débauches rivales des repas, de ces époques où s’illustraient des hommes plus que sobres chez les nations déjà grandies et puissantes. N’y eut-il pas un temps, à Rome, où l’oseille était le mets en faveur, où les gourmets les plus raffinés n’avaient que deux plats à dîner, où Caton, ce butor de vertu, ne prenait à son premier repas que du pain et du vinaigre ? Les friandises el le luxe ^arabes étaient bien aussi restreints, même dans les grandes occasions, même aux banquets dont on. régalait les voyageurs et les hôtes que le ciel envoyait à une famille. A la manière patriarcale, on égorgeait des moutons, des che-