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Réciproquement l'hélium doit pouvoir être dissocié par ces mêmes rayons ultra X avec régénération des atomes d'hydrogène : ce serait une radioactivité endothermique, et non spontanée, qui peut se produire dans les astres à titre de phénomène secondaire beaucoup moins important que la disparition inverse d'hydrogène[1].

Après l'hélium apparaîtront successivement les éléments plus lourds, et pour beaucoup d'entre eux sans émission d'énergie comparable à celle qui accompagne la formation de l'hélium. On sait en effet que par exemple le poids atomique du carbone est, au dix-millième près, 3 fois celui de l'hélium ; il ne se perd donc pas dans cette union plus que 1 milligramme (ce qui permet encore une «chaleur de réaction », inaccessible à nos balances actuelles, mais pourtant de quelques milliards de calories).

L'équation d'une telle réaction s'écrirait

W + 4He -> C + Hn’

(en admettant qu'il n'y a pas de radiation absorbée). Il faut observer que l'égalité (approchée) de 3He et C n'implique pas que la fréquence n’ du rayonnement émis est petite, car Hn’ est au moins égal à l'énergie cinétique, peut-être très grande, que devaient avoir trois noyaux positifs d'hélium pour s'approcher à la distance colossalement petite où, la loi de Coulomb cessant de s'appliquer, la réaction nucléaire devient possible. Ce ne seront peut-être donc que des rayons très durs qui pourront démolir le noyau de carbone en régénérant l'hélium.

Les mesures précises de poids atomiques montreront sans doute prochainement si dans la formation d'atomes de plus en plus lourds il se fait parfois des pertes de masse comparables à celle qui accompagne la formation d'hélium. J'ai déjà fait remarquer que le poids atomique 126,91 de l'iode (qui n'a pourtant pas d'isotope, comme l'a vu Aston) diffère appréciablement d'un entier. Cette remarque paraît se généraliser déjà pour les poids atomiques supérieurs à disons 50 (poids atomiques tous un peu inférieurs aux valeurs entières).

Il n'est au reste pas exclu, comme me l'a fait observer M. J. Becquer

  1. Cette destruction d’hélium pourrait bien avoir lieu dans les couches supérieures de notre atmosphère sous l'action de rayons émanés du Soleil et capables de traverser une couche d'air notable. J'expliquerais ainsi l’absence énigmatique des raies de l’hélium dans l'aurore boréale, et aussi pourquoi même dans les couches inférieures la proportion d'hélium est plus faible qu'il ne semble raisonnable d'après ce que débite sans cesse le sol, toujours radioactif.