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pour 100 est réduite à la teneur de 10 pour 100. Si la réduction continuait à cette allure sans s'accélérer, il faudrait environ, un quart d'heure pour atteindre la concentration pour laquelle, à ces épaisseurs, la fluorescence a pratiquement disparu. Or, il suffisait d'attendre 1 minute, à partir de l'instant d'éclat maximum, pour noter cette disparition.

Il faut donc que, à l'inverse de ce qui se passe pour une réaction chimique ordinaire (loi d'action de masse), le taux de destruction par la lumière soit beaucoup plus élevé quand la concentration est très faible, ou, ce qui revient au même, une masse donnée se détruit d'autant plus vite qu'elle est plus diluée.

Or la fluorescence par unité de masse est également d'autant plus grande que la concentration est plus faible. C'est, en effet, comme je l'ai montré plus haut, parce que la fluorescence par unité de masse décroît lorsque la concentration croît que nous pouvons observer un maximum de fluorescence dans une couche d'épaisseur fixée.

Émission de fluorescence et vitesse de disparition du corps fluorescent varient donc dans le même sens[1] pour une masse donnée de ce corps. Au contraire, toujours pour une masse donnée, l'émission de fluorescence et la concentration varient en sens inverse l'une de l'autre.

Pour expliquer ces phénomènes, j'avais supposé que la fluorescence ne signale pas la présence des molécules encore intactes, mais leur disparition, et que c'est au moment seulement où une molécule disparaît qu'elle jette un éclair, la somme de ces éclairs constituant la fluorescence.

Tout en gardant ce qui est essentiel en cette hypothèse (émission discontinue de lumière accompagnant une réaction chimique), je dois la retoucher sous la pression de faits découverts par M. Levaillant, préparateur dans mon laboratoire, qui a bien voulu prendre comme objet de recherches l'étude chimique précise de la destruction des corps fluorescents par la lumière.

Entre autres faits, il trouve qu'un corps fluorescent ne se détruit pas toujours selon la même réaction, le solvant ou l'air pouvant jouer un rôle capital. Par exemple, l'uranine se détruit dans la glycérine par fixation d’hydrogène (avec formation d'un leuco dérivé) ; dans l'eau, elle se détruit par oxydation aux dépens de l'air dissous ;

  1. Et proportionnellement l'une à l'autre, je présume, sans avoir encore fait les mesures photométriques nécessaires.