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DE JULIE


Comment pus-je survivre à cette nouvelle ! la révolution qu’il me fit, au contraire, me causa une sueur violente qui emporta ma fièvre : les larmes que je répandis en abondance me soulagèrent ; mais je tombai bientôt dans un épuisement et une langueur qui firent craindre quelque chose de plus sérieux. Madame Renaudé vint me voir l’après-midi, je lui appris l’odieuse nouvelle qui me désespérait : je ne lui cachai rien de la manière indigne dont Vépry en avait agi avec moi. La douleur que je lui témoignai l’étonna, elle ajouta qu’elle m’avait soupçonnée n’être point piquée d’une intrigue que personne n’ignorait ; que la manière aisée et l’air tranquille dont j’avais entendu certains propos à ce sujet leur avait fait croire que je ne demandais pas mieux que de trouver l’occasion d’une rupture ; qu’ils s’étaient depuis quelque temps aperçus d’un goût décidé qu’ils avaient l’un pour l’autre ; qu’ils avaient appris le matin même le détail de cette intrigue, telle que je l’ai rapportée plus haut, par le moyen du domestique de la Beauval, auquel elle avait donné congé. Tout ce que madame Renaudé me dit me parut un songe, et quoiqu’elle n’ajoutât rien qui ne fût capable de calmer le désespoir le plus vif, je ne pus prendre le dessus. Uniquement occupée de ma douleur, je ne pouvais digérer l’affreuse idée d’être aussi cruellement trahie.