moins je le craignais : la division entre les deux
frères aurait pu avoir des suites. Le parti que
je pris me parut plus sûr pour moi, et plus
fâcheux pour mon traître : je n’accordai rien au
premier mouvement ; mais je raisonnai ma vengeance.
Je me fis ramener chez moi, où sans
perdre de temps je mis la main à l’œuvre.
On se souvient bien sans doute que dans le détail que Vépry m’avait fait à Bordeaux de la colère de son père contre son frère, dont il craignait quelque suite fâcheuse, il m’avait appris qu’il cherchait à s’en assurer ; que, malgré toutes ses mesures, il n’avait encore pu parvenir à le faire arrêter. Rien ne me parut plus facile que de lui en procurer les moyens. J’écrivis une lettre anonyme au père, dans laquelle je lui marquai que les bassesses de son fils le déshonoraient ; que s’il tardait à profiter de l’avis, il ne serait peut-être plus temps de prévenir la Justice, qui ne pourrait tôt ou tard manquer de mettre ordre à son brigandage ; qu’il était actuellement à Marseille, sur le point d’abuser de la confiance de fort honnêtes gens, sous le nom d’Andricourt, qu’il avait depuis peu substitué à celui de Chevalier de Bellegrade : qu’il n’était pas possible qu’un homme, sans revenus ni talents, fit une certaine dépense, à moins d’avoir recours à d’indignes ressources. Je mar-