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LES ÉGAREMENTS


occupé de mon projet, je brusque connaissance avec un vieux visage que j’avais remarqué parler quelquefois à la dame ; je lui communique, sans façon, mon dessein, et fais mes offres comme à quelqu’un trop heureux de les faire accepter. Sans trop prendre garde à l’air dont on reçoit ma proposition, je signifie qu’on ait à me rendre réponse le soir : j’étais dans la meilleure foi du monde, n’imaginant pas qu’on pût me regarder comme un enfant, et faire des gorges chaudes d’une affaire que je traitais aussi sérieusement. Mon début en bonne fortune ne devait pas être brillant, comme tu vas voir : quelque humiliante que fut l’aventure, je ne me ferai pas grâce de la moindre circonstance.

Je rejoins ma vieille sorcière sur le soir, qui me dit qu’on consent à tout pour le lendemain, que je n’ai qu’à me trouver à dix heures de nuit à la porte de la rue, qu’on m’introduira secrètement à la chambre de la dame. Tout fier du succès, je rentre au logis pour rêver aux moyens de faire ma somme ; je n’en trouve pas de plus prompt que d’emprunter des deniers de mon père : je me saisis d’une clef, je ne prends fidèlement que ce dont j’ai besoin. Une aussi heureuse réussite me dit que le Ciel se déclare pour moi : je m’en félicite. L’heure arrive enfin, je me trouve au rendez-vous ; je gratte, on