croyait enfin me rendre lui seul telle qu’il me
désirait. Supposant au contraire que j’eusse combattu
mon penchant pour remplir les prétendus
devoirs de la fidélité, je n’aurais pu vraisemblablement
résister à un ennui, une mélancolie qui
auraient bientôt excité des soupçons que les
protestations les plus vives n’auraient pu détruire.
Ce principe posé, je conclus que la fidélité n’est
qu’une vertu inutile ; qu’elle cesse même d’être
vertu, quand, loin de nous rendre heureux, elle
altère notre bonheur. Ce qu’on appelle bien
comme ce qu’on appelle mal, cesse souvent
d’être, l’un ou l’autre, ce qu’il nous paraît dans
le premier point de vue. Les effets résultants
d’une action devraient seuls la caractériser :
que de preuves convaincantes de ce que je viens
d’avancer ! M. Démery n’eut jamais d’aussi beaux
jours avec moi que ceux que je passai avec
Derval. Le moment de notre séparation vit
bientôt naître ses inquiétudes. L’Opéra ayant
pris des arrangements pour Toulouse, il fallut
me résoudre à l’éloignement de mon amant ;
rien ne put l’arrêter, il eut assez de force pour
refuser les offres que je lui fis de le retenir. Que
je payai cher l’habitude que je m’étais faite de
ne pouvoir me passer de lui ! Après m’avoir
témoigné les plus sensibles regrets, et réitéré
les assurances d’un prompt retour, il partit et
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LES ÉGAREMENTS