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DE JULIE


donne volontiers à ces êtres entièrement spirituels et détachés de la matière. L’amour platonique ne sera jamais le mien. Qu’un homme est sot et humilié lorsqu’il se trouve autant d’impossibilité à se rendre heureux qu’il a témoigné d’ardeur à le devenir ! On pénètre furtivement jusqu’à mon lit, on m’approche, je me réveille adroitement. Je témoigne de la surprise, de l’embarras, de la crainte même ; on me rassure, on s’annonce avec cette émotion qui précède ordinairement le moment désiré. On me presse ; je résiste : les plus tendres expressions me garantissent un amour éternel. Je me trouble, on en profite ; je me défends, on poursuit, on m’embrasse : les plus brillantes apparences m’avertissent qu’il est temps que mes forces diminuent ; je sens qu’on s’enhardit, je gémis sur la méchanceté des hommes : on s’en excepte, on me persuade ; je me rends enfin sur la foi des serments, n’opposant plus que quelques précautions de bienséance. Je maudis intérieurement le moindre délai, et toutes les minauderies ordinaires qu’un tyrannique usage exige en pareil cas ; impatiente d’être au moment où les transports les plus vifs semblent excuser une faiblesse, je bégaie un que vous êtes cruel ! mais en vérité je ne vous reconnais pas-là… Mais je vous dis que c’est inutile… Dans l’instant