rent de m’obéir : il me prit entre ses bras, me
jeta sur un petit lit pratiqué dans une alcôve,
dont le crépuscule semblait fait exprès pour
sauver à la modestie les opérations de l’amour.
Les inutiles efforts que je fis pour me retirer
secondèrent bientôt son dessein : mon émotion
lui fit beau jeu. Finissez donc, criai-je. Je n’en
ferai rien, me dit-il. Les forces me manquèrent,
son courage s’anima ; mes jupes me trahirent,
il en profita, et nous rendit heureux. Que je
me trouvai soulagée ! Quand une fois on a passé
le premier pas, on n’est plus obligé de faire
composer le plaisir avec la bienséance. Au contraire,
ce n’est plus que par les transports les
plus vifs qu’on s’excuse sur une faiblesse. Je
n’eus plus rien de caché pour Bellegrade ; dès
cette même journée je lui confiai l’état de nos
affaires, mes aventures et celles du sieur Valérie,
au sujet duquel, je le dis à ma confusion, j’eus
la bassesse de le mettre au fait. Je lui expliquai
tout, mon enlèvement, la caisse détournée, le
nom du financier ; je ne lui cachai rien, et par
conséquent portai moi-même les derniers coups
au seul homme qui ait jamais mérité la plus
vive reconnaissance. Nous convînmes de notre
heure pour ménager nos heureux moments,
pendant lesquels Bellegrade joua tous les ressorts
imaginables pour gagner entièrement ma
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DE JULIE