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LES SOLUTIONS

ments de congélation ainsi produits par 1 molécule-gramme de sel et par 1 molécule-gramme de sucre va en croissant et tend vers 2, en sorte que, en solution très étendue, 1 molécule-gramme de sel a la même influence que 2 molécules-gramme de sucre.

Tout se passerait de cette façon, si, en solution, le sel était partiellement dissocié en deux composants vérifiant séparément les lois de Raoult, et si cette dissociation devenait complète quand la dilution est très grande. Il faudrait donc admettre que les molécules NaCI se brisent en atomes Na de sodium et Cl de chlore et qu’une solution très étendue de sel marin ne renferme réellement plus de sel, mais du sodium et du chlore, à l’état d’atomes libres. Et c’est bien ce qu’osa soutenir avec une hardiesse géniale, un jeune homme de vingt-cinq ans, Arrhenius (1887).

Cette idée parut déraisonnable à beaucoup de chimistes, et cela est bien curieux, car, ainsi qu’Ostwald le remarqua aussitôt, elle était en réalité profondément conforme aux connaissances qui leur étaient le plus familières, et à la nomenclature binaire employée pour les sels : que tous les chlorures dissous aient en commun certaines réactions quel que soit le métal associé au chlore, cela se comprend très bien si dans toutes ces solutions existe une même sorte de molécules, qui ne peut être que l’atome de chlore ; dans les chlorates, qui ont en commun d’autres réactions, la molécule commune ne serait plus Cl, mais le groupement ClO3, et ainsi de suite.

Sans se préoccuper de cet argument, les adver-

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