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JEANNE-DES-HARENGS.

« Un matin, une fillette de dix ou onze ans, Mlle Thérèse Louvet, vint acheter deux sucres d’orge.

« Jeanne-des-Harengs n’était pas à sa place habituelle. Croyant la marchande sortie, la petite s’arrêtait indécise, lorsqu’une voix grêle et cassée, partant du fond de la chambre, l’engagea à s’approcher.

« Je suis malade, mademoiselle, disait Jeanne. Voulez-vous être assez bonne pour vous servir vous-même ? »

« Thérèse prit deux sucres d’orge et glissa dix centimes dans le tiroir. Puis, au moment de s’en aller :

« Si je pouvais vous être utile, Jeanne ? Désirez-vous quelque chose ?

— Ah ! chère enfant du bon Dieu, donnez-moi à boire, s’il vous plaît. J ai la fièvre, je meurs de soif. »

Thérèse était une fillette adroite et entendue. Elle eut bientôt fait de ranimer le feu et de mettre chauffer de la tisane. Mais, pendant qu’elle était absorbée par ces soins, la porte s’ouvrit de nouveau, et un beau garçon d’environ quatorze ans, soulevant son képi de lycéen, demanda de la ficelle.

« Je vais vous servir, monsieur Edme, dit Thérèse, en reconnaissant le fils de leur voisin, M. Savry. C’est moi qui suis la marchande aujourd’hui : Jeanne a la fièvre. »