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terrible que bien des gens se sont imaginé que je me changeais en fureur. Mais s’il m’arrive quelquefois de faire beaucoup de mal, je puis dire qu’en récompense je fais beaucoup de bien. La Fortune qui se vante partout que c’est à elle seule qu’il appartient de rendre heureux ceux qu’il lui plaît n’y entend rien au prix de moi ; quelques biens et quelques honneurs qu’elle donne à un homme, il n’est jamais content de sa condition ; et on lui voit toujours envier celle des autres, ce qui n’arrive point aux vrais amants. Pour peu que je leur sois favorable, ils ne croient pas qu’il y ait au monde de félicité comparable à la leur ; lors même que je les maltraite, ils se trouvent encore trop heureux de vivre sous mon empire ; et je vois tous les jours de simples bergers qui ne changeraient