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NÊNE.

Tout de suite, ils se regardèrent avec des yeux de haine, les vieux comme les jeunes.

Le repas s’achevait dans le tumulte. Le Dissident qui avait parlé criait à Boiseriot et à son camarade :

— Sortons-nous ?

Les femmes étaient accourues et se tenaient, tremblantes, à l’entrée de la grange. Heureusement personne n’était ivre et l’on n’échangeait encore que des paroles.

Cuirassier était un des plus calmes. Il disait :

— Le Salutiste a raison… il tient dur pour son idée. Chacun est libre… S’il veut boire de l’eau, lui… Le vin est bon et mauvais : il chauffe un homme puis il le brûle… Il dit qu’il ne veut pas s’empoisonner : je suis de son goût !

Parlant de la sorte, il avalait sans s’en apercevoir de nombreuses rasades et il s’énervait peu à peu.

Madeleine avait les yeux sur lui, mais elle n’osait pas l’avertir devant tous ces gens. Elle avait aussi les yeux sur Michel qu’elle savait entêté et très orgueilleux, très âpre dans ces discussions. Il ne disait rien parce qu’on était chez lui, mais il était pâle et ses mâchoires se serraient.

— Ils se battront, oui ! disait la vieille.

Et comme elle avait vu d’autres scènes de ce genre, elle s’avançait entre les deux tables, criant à l’un et à l’autre :

— Tais-toi ! Tu es fou !… Mange donc… et puis bois !

À son bout de table, les yeux flambants, Samuel