Page:Perochon - Nene.djvu/66

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Madeleine ramena les enfants sous le chêne. Elle avait peur de l’eau depuis son enfance. Une vieille tante un peu folle lui avait fait tant de contes de fadettes et de laveuses noires qu’elle ressentait toujours, devant l’eau dormeuse des étangs, une sorte d’attirance mystérieuse et effrayante.

— Il ne faut pas s’approcher, vois-tu… Il y a dans l’eau des bêtes très méchantes qui tirent les petits enfants par les pieds…

— Jouons, Madeleine ! disait Lalie sans écouter. Je serais une marchande, je vendrais des épingles… Jo serait un petit garçon… tu serais sa maman. Vous seriez dans votre maison… Tu vois : ces petits bois, c’est des épingles… Je frapperais à la porte : « Il y a du monde ? »… Tu dirais : « Bonjour Madame, je voudrais des épingles pour attacher le fichu à mon petit garçon… Entends-tu, Madeleine ? Jo est un petit garçon… tu es sa maman !… Si tu aimes mieux, ça serait des dragées… Jo dirait : « maman, je veux des dragées à la marchande… »

— Petite sotte ! tu vois bien qu’il ne peut pas dire cela… Écoute-le !

— Ma… ma… ma ! bégayait Jo.

— Il faut lui apprendre, Madeleine ! Jojo, dis : ma-man, je veux…

— Ma… ma… ma… Oup !

— Tu ne sais pas t’amuser, Jo, dit la sœur ; Lalie va s’amuser toute seule.

Madeleine, subitement rouge, avait pris le petit sous les bras ; elle le tenait en face d’elle, tout près de son visage.