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NÊNE.

— Je n’habiterai plus ce bel endroit ; j’étais accoutumée et cela me fait mal de partir… Je regretterai la maison qui est avenante… je regretterai l’étang, le ruisseau où je lavais… Où trouverai-je un jardin aussi bien à ma commodité ? Je ne verrai plus le buisson de lilas ni les rosiers du courtil…

Elle cherchait à égarer sa peine par ces petits chemins. Ah pauvre ! suis donc la grande route ! Ces deux chétifs qui dorment et dont tu n’entends seulement pas le souffle, tiennent tous tes amitiés prisonnières…

— J’étais la patronne, ici ; en la maison, tout allait par ma voix… Ailleurs, cela changera !

Va, va, ta malice est courte !

— Je serai rudoyée ; j’irai aux champs avec les hommes.

Il s’agit bien de cela ! Ah ! si l’on voulait, elle ferait bien toute l’année le travail d’un valet, elle moissonnerait bien, elle porterait bien les fardeaux.

— Bonsoir, Madeleine !

Elle releva la tête ; un homme qu’elle n’avait point entendu venir était dans le courtil.

— Bonsoir, dit-elle.

Alors l’homme s’avança.

— Tu ne me reconnais pas ? L’habit militaire me change donc bien !

Elle eut un geste de réveil.

— Gédéon !

— Oui, c’est moi… J’ai eu une permission… Maintenant, je vais à Château-Blanc prendre le train. Je n’ai pas eu beaucoup de temps à passer au pays ;