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NÊNE.

— Tiens ! dit-elle, je l’ai bien cassée !… Elle n’était pas solide ; je t’en achèterai une autre.

Et, prenant les deux enfants par la main, elle sortit de la maison.

Le ciel était ouvert ; la terre reposait. Ce n’était pas encore la nuit, mais en ce crépuscule dominical, les champs ne retentissaient pas du travail des hommes. Le vent était mort ; rien ne s’acharnait ; toute vie était étendue.

Madeleine avait conduit les enfants près de l’étang et, avec eux, elle s’était assise au pied du grand chêne sous les feuilles immobiles.

La paix était souveraine. Les enfants ne jouaient pas ; ils avaient des gestes doux et posaient des questions inattendues.

Madeleine leur répondait lentement.

C’était comme un pèlerinage qu’elle faisait. Sous ce chêne, en un jour pareil, un grand émoi l’avait fait défaillir. Alors, la joie était en elle et, par grâce de jeunesse et par illusion d’amour nouveau, les belles heures à vivre s’étendaient innombrables. Maintenant, elle était malade, maintenant elle n’osait plus regarder en avant, maintenant elle venait pour l’adieu.

Corbier se mariait dans dix jours. Elle n’avait plus qu’une semaine à passer aux Moulinettes. Une semaine !… et puis s’en aller !… Loin de Lalie, loin de Jo, recommencer une vie nouvelle. C’était pire que la mort !

Allons ! c’était un mauvais rêve ! Elle allait se réveiller, ne plus souffrir ; elle allait trouver la tête