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NÊNE.

— Pourquoi écoutes-tu ce gars protestant ?

La petite redressa la tête comme pour se mettre en défense.

— Ah ! oui ! tiens, toi aussi tu es contre lui ! Qu’a-t-il donc fait pour ne pas valoir les autres ? Saurais-tu le dire ?

Madeleine reprit, avec douceur, cette fois :

— Mais, ma belle, je ne suis pas contre lui ; c’est au contraire un garçon que j’aime beaucoup.

— Eh bien, alors ! puisque c’est pour la vie ! puisque nous voulons nous marier !

— Une dissidente avec un protestant ! Cela ne s’est jamais vu.

— Qu’est-ce que cela fait ? Je veux qu’on me le dise !… Qu’est-ce que cela peut te faire à toi ? Qu’est-ce que cela peut faire à maman, à Fridoline, à Jean, à tous les autres ?… Du moment qu’il vient à moi, vous n’avez rien à dire… Cela ne le préoccupe pas, lui, ces histoires de religion… cela le regarde !… Quand il aura fini son temps, je serai prête : c’est juré !

Madeleine la laissait parler ; et elle était chagrine à cause de cette insouciance des siens à l’endroit de choses qui lui semblaient si respectables ; mais elle était surprise aussi et un peu troublée devant ce bel amour qui se levait en souverain.

— C’est juré, disait Tiennette ; nous avons juré tous les deux… Mais maintenant, s’il allait croire que je suis une voleuse. Ah ! Madeleine, ma peine est grande !