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PRÉFACE.

— selon le point de vue du spectateur — est tragique ou comique, qui est réconfortante ou décevante, mais qui se passe toujours dans des conditions fixées par le pays, par les mœurs et par le temps.

Plus brièvement, nous demandons au roman d’être vivant. Vrai ou faux, qu’il nous donne l’impression non pas du possible, non pas du vraisemblable, mais l’impression du vrai.

Or, copier strictement le vrai, ce n’est, ni plus ni moins, que travailler à mettre au monde une œuvre morte.

L’écrivain ne doit donc pas copier la vérité. Il doit la créer — et pour la créer, il doit prélever l’essence de ce qu’il lui faut dans ce qu’il voit, la transporter dans les tableaux qu’il a saisis ou qu’il a imaginés, et refaire avec eux de la vie.

C’est l’affaire du véritable romancier.

Son art ne s’apprend pas. Il le construit lui-même : encore faut-il que, pour la base, il ait trouvé la large pierre qui supportera tout l’édifice. Juché sur elle, celui qui deviendra plus tard un romancier, contemplera ce qui l’entoure. Du premier coup, son œil verra, dans la vie qui l’environne, ce qu’il devra recréer dans le creuset de l’écrivain qu’il deviendra. Alors, il pourra se mettre à construire son édifice sur la large pierre qui tient au sol et à laquelle nulle autre ne peut être substituée.

Cette pierre, Ernest Pérochon l’avait dans son domaine. De cet observatoire, avant d’écrire, il a longuement regardé la contrée autour de lui ; il a sorti, de ci de là, les documents qu’il a cru devoir