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NÊNE.

paraître et les poissons qui vivaient sur les bords se mirent à voyager et à battre l’eau de furieux coups de queue.

Enfin, le mercredi, ce fut la pêche.

Dès la fine piquette du jour un aubergiste de Saint-Ambroise vint s’installer aux Moulinettes.

Après lui les drôles des alentours ne tardèrent point ; on en vit deux d’abord, puis deux autres, puis dix ; bientôt ils furent une trentaine, garçons ou filles, empaletoqués à la diable et le nez frais.

Les poissons commençaient à sortir. Ils arrivaient dans « la poêle », un petit réservoir peu profond et barré à son extrémité par un grillage assez fin. Les premiers qui vinrent furent les ablettes ; elles arrivaient vivement par bandes nombreuses et puis, une fois dans cette eau déjà trouble de la poêle, elles semblaient reconnaître qu’elles avaient pris un faux chemin et s’efforçaient de remonter par le bondon. Mais le courant, trop fort, les ramenait et elles se mettaient à circuler éperdument. Après elles, vinrent les gardons, puis les brèmes. Le réservoir fut merveilleusement agité et vivant. D’innombrables petites lignes brunes filaient à la surface de l’eau ; de temps en temps une grosse brème montait du fond et se retournait d’un coup brusque, large et brillante comme un plat d’étain.

À neuf heures on commença à pêcher. Gédéon et Alexis, le nouveau valet, avaient chacun une grande épuisette ; debout sur les bords de la poêle, ils plongeaient sans relâche leur filet. Derrière eux un homme recevait les poissons et les portait dans des