— Je vous dis, moi, qu’il ne mérite pas cet affront ! Il ne vous a rien fait…, que travailler honnêtement pour vous en sa jeunesse et que vous défendre maintenant contre les ennemis étrangers.
— Tais-toi, Éveline !
— Vous êtes de cœur injuste, père ! et vous êtes dur pour moi comme pour lui.
— Tais-toi, Éveline !
Elle tint encore, prenant appui sur les paroles de Maurice.
— J’ai vingt-cinq ans, père, et je suis libre dans mes amitiés ! Il faut que je vous le dise, à la fin ! Si ma mère n’était pas morte, elle serait avec moi pour vous donner tort… Vous, père, vous n’avez plus en tête que vos champs, que vos prés, que votre argent ! Je ne suis pas comme vous, sachez-le bien ! Je n’ai pas besoin de champs, de prés, ni de maison…, et mon argent, prenez-le pour en faire ce que vous voudrez… Que je sois la dernière du village, cela me sera bien égal, pourvu que j’aille où mon cœur me porte !
Mazureau avait levé la main en un geste de menace.
— Tu as vingt-cinq ans et tu n’as pas de raison ! gronda-t-il. La dernière du village ! Fille sans honneur !… Tu ne seras pas la dernière du village, mais la première ! Que cela te plaise ou non !… Une Mazureau ne s’abaisse pas, elle monte… Et, à l’avenir, ne chante pas si haut devant moi ; tant que tu seras en ma maison, tu marcheras à ma voix !
Il rabattit sa main et meurtrit le poignet d’Éveline.
— Il n’y a pas de besogne ici pour toi, dit-il.