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LA PARCELLE 32

de pierres, tournait et retournait vingt fois sous sa masse.

À l’habitude, Éveline n’avait pas le courage d’attendre ; quand le facteur arrivait à la hauteur du père Bernou, elle se sauvait à la maison.

Mais ce matin, elle devait avoir une lettre ! Son rêve de la nuit ne pouvait pas l’avoir trompée…

Tout à coup, sur le mur des Marcireau, Vainqueur se dressa, les oreilles hautes. Éveline leva la tête et son cœur sauta… Mais non ! fausse alerte ! Le chien s’était de nouveau immobilisé, gris sur le mur gris, dans l’attitude d’une bête de pierre.

Vraiment, cela n’avançait pas beaucoup le facteur d’attendre ainsi. Éveline rentra chez elle et se mit à sa vaisselle, pensant :

— Il viendra avant que j’aie fini.

La vaisselle rangée, elle courut encore derrière le pailler : le père Bernou n’avait pas bougé, le chien non plus. Le facteur n’était donc pas passé, il n’y avait rien de perdu.

Et enfin, c’était bien sûr : elle aurait une lettre ce matin, il n’y avait qu’à attendre !

Elle fit un tour dans le jardin, passa dans le fournil, revint encore à la maison où elle accrocha la marmite pour le déjeuner.

Dix heures sonnèrent ! Jamais le facteur ne venait si tard ! Inutile d’espérer maintenant.

Éveline passa dans sa chambre. Sur son lit, une jupe était étalée avec un gai corsage et le tablier du dimanche. Mais, vraiment, elle n’avait pas le cœur à faire toilette aujourd’hui. Ses jambes tremblaient et, dans sa poitrine, son cœur frappait comme une méchante petite bête acharnée.

Machinalement, elle ôta son corsage, défit ses