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LA PARCELLE 32

Sa voix trouble d’adolescent s’éclaircissait, devenait nette et sèche ; il prenait taille d’homme et, sur ses mâchoires, quelques poils blonds frisottaient.

Le grand-père que personne n’avait fait plier, le dur paysan devant qui tous ceux de la famille avaient tremblé, écoutait maintenant le fils de son fils et, le plus souvent, agissait selon son commandement.

— Il faut vendre la jument, disait Bernard.

Ils vendirent la jument. La jument partie, la carriole ne pouvait que gêner ; ils vendirent la carriole et ils vendirent les harnais. Le tout fort cher, trois fois à peu près ce qu’on avait déboursé pour l’achat.

Ils furent alléchés par ce résultat. Puisque tout se vendait si aisément, pourquoi ne pas profiter du moment ? Ils pourraient peut-être ainsi réunir la grosse somme avec laquelle ils ne craindraient plus personne. Le jour venu, ils la sortiraient de sa cachette comme une arme bien fourbie et tenue en réserve ; et ils assommeraient Sicot et les autres.

Ils firent la chasse à toutes les choses momentanément inutiles qu’ils possédaient. Mazureau finit par y mettre le même acharnement que Bernard. Ils rassemblaient tout sous le hangar : vieux outils, vieux coffres, cordes effilochées, sacs rapiécés, treillage de fil de fer, jusqu’à des tuiles et des madriers.

À tout moment, l’un d’eux découvrait quelque nouvel objet.

— Cette attache, demandait Bernard, on la vend ?