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CHAPITRE V


Éveline, à présent, ne pouvait plus douter. Elle ne pouvait plus se dire : c’est le chagrin…, ou c’est l’émotion…, ou c’est la fatigue.

Non ! Elle s’était donné ces mauvaises raisons aussi longtemps que possible ; elle s’y était raccrochée comme une personne en danger de se noyer se raccroche à tout ce que sa main peut saisir, plume, brin d’herbe, branchette flottante.

Maintenant, quand elle se regardait dans sa glace, elle savait la cause de sa pâleur ; elle ne s’étonnait plus devant ses yeux cernés de mauve, ses cheveux ternis et ses joues sèches dont la peau se piquetait de points roux.

Heureusement, elle n’allait plus travailler aux champs. Comment eût-elle pu dissimuler ces nausées qui la faisaient verdir et, surtout, ces faiblesses soudaines qui lui cassaient bras et jambes ?

Elle ne voyait les hommes qu’aux heures des repas. Elle s’ingéniait alors à trouver des raisons d’abréger le temps qu’elle passait à les servir.

Mazureau et Honoré, avant de quitter la table, prolongeaient souvent leur conversation. Mazureau ne s’occupait point de sa fille, mais, quand elle se déplaçait, les yeux lestes du gars viraient pour la suivre ! Dès qu’elle pouvait, elle passait dans sa chambre ou bien sortait dans le courtil.