— Je vais faire mon prix un de ces jours, dit Honoré, car la fin du bail est proche.
Mazureau insista plus fort que jamais.
— S’il tire en arrière, ne le marchande pas ! Tu affermeras cent fois pour une…, et lui, puisqu’il a de si grandes terres, à son dire, eh bien, il les cultivera, donc ! S’il ne voulait pas acheter les Brûlons, je te dirais : ce n’est pas mon affaire d’aller contre les petits…, mais chacun à son rang, voilà mon idée !
Il fit le geste de tordre une hart.
— Serre-le, Honoré ! Serre-le !
— Vous pouvez être tranquille, dit le gars ; je n’y faillirai point…, s’il veut prendre le galop devant nous, je suis là pour le remettre au pas.
Mazureau souffla comme un lutteur qui vient de poser le genou sur l’adversaire. Pour bien montrer à Honoré combien il estimait son alliance et, aussi, pour ne pas être trop en reste, il dit :
— Il y a encore deux heures de jour et, chez nous, je puis me passer de toi. Va donc, s’il te plaît, jusqu’à mon pré derrière le village… Éveline doit y être… Tu répareras, si tu veux, une brèche à la palissade et puis tu aideras Éveline à ramener ses bêtes.
Les ordres de cette espèce, Honoré les comprenait du premier coup. Il remonta son pantalon qui avait glissé sur ses reins, resserra sa ceinture, assura son chapeau et, tout de suite délassé, vers le pré des Mazureau s’en fut légèrement. Éveline l’entendit trotter, plan ! plan ! sur les pierres du chemin comme un jeune innocent, et il se présenta devant elle, une branchette fleurie entre les dents.