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LA PARCELLE 32

quant. Sous le ciel bas, dans cette grande étendue plane et sans arbres, un vent cruel bondissait et faisait front. Mazureau n’y prenait point garde, mais le petit geignait de temps en temps.

— Cré nom ! le vent coupe !

Il s’arrêta un instant pour rabattre les oreillères de sa casquette. Le grand-père, ne le sentant plus à côté de lui, se retourna et son regard, vague, se posa sur l’enfant.

— Que fais-tu donc, Bernard ?

— C’est que j’ai les oreilles glacées…, et puis le bout du nez aussi.

Mais le grand-père n’entendait pas. Depuis les paroles du notaire, toute sa pensée était en travail.

— Mauvais temps ! disait l’enfant ; la terre n’est pas gelée, cependant rien ne pousse. Il faudrait un peu de soleil à ce moment de l’année, et de l’eau, n’est-ce pas, pour les emblavures ?

— Oui ! de l’eau… de la pluie douce… Dis-moi, Bernard ?

— Quoi donc, grand-père ?

Le grand-père n’acheva sa pensée que vingt pas plus loin.

— Dis-moi Bernard, t’en retournerais-tu à la ville avec ta mère si elle voulait t’emmener ?

— Non !

— Si elle veut, cependant…

— Elle ne m’emmènera pas ! Je ne veux pas, moi ! Ma place est ici ; c’est ici qu’il y a du travail pour moi.

— Mais elle parlait de te mettre à l’apprentissage, ta mère…

— Je n’irai pas ! Mon père est mort à la guerre… j’ai des droits !