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LA PARCELLE 32

Mazureau répondit :

— C’est un gars de rien…, un enrichi de guerre.

Et il s’en alla sans attendre son compagnon.

Mazureau rentra à Fougeray tout seul et, bien qu’il eût lui-même vendu son veau plus cher qu’il n’espérait, de fort méchante humeur.

De chaque côté de la route, dans les champs, des gens travaillaient. Ils travaillaient leurs terres. Il y avait par là de riches paysans ; Mazureau connaissait à Saint-Étienne de hautes familles. Les anciens étaient partis de peu ; ils ne comptaient pas au temps où l’on parlait des Mazureau de Fougeray. Mais ils avaient su s’élever pendant que d’autres baissaient et, à présent, leur nom était sur les lèvres des gens, même à la ville. Malgré la guerre, leurs champs étaient cultivés comme des jardins ; ils avaient su trouver des valets et, surtout, les machines ne leur manquaient pas.

À mi-chemin, entre Saint-Étienne et Fougeray, Mazureau s’assit sur un tas de cailloux. Il sortit son porte-monnaie et compta son argent. Il avait eu huit cents francs d’un veau qu’il eût été bien content de vendre quarante écus jadis. Les prix montaient toujours à grande allure et l’argent venait de tous les côtés dans la bourse des paysans. L’occasion était belle d’acheter puisque les messieurs riches vendaient leurs terres. L’occasion était unique ; on tous les cas, lui, Mazureau, à soixante-huit ans sonnés, ne la retrouverait jamais plus.

Par malheur, il avait un peu vidé son tiroir lors de la vente des Poitevin. Il avait envoyé l’argent de sa récolte et, pour le moment, il n’avait pas