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LA PARCELLE 32

Sicot n’avait pas hâte de vendre. Il voulait d’abord montrer ses bêtes. Sûr de sa marchandise, il pouvait attendre et voir venir.

— Mes bœufs sont de première, dit-il. Ils en ont dans la culotte !… Celui qui les veut, qu’il parle largement !

L’autre reprit, tout doucement :

— Mon ami, je n’ai pas de temps à perdre… Voulez-vous vendre, oui ou non ? Si c’est oui, dites votre prix.

Alors Sicot jeta gaillardement :

— Huit mille francs !

— C’est entendu ! dit l’autre ; je les prends !… À onze heures, soyez à la gare pour l’embarquement et le payement.

Il appela un jeune homme qui le suivait et lui fit marquer les bœufs de deux coups de ciseaux. Puis il acheta, sans plus d’embarras, deux des maigres nantais.

Ceux qui étaient là comprirent que ce petit vieux était un gros marchand.

Sicot, lui, n’en revenait pas. Les voisins de foirail l’entourèrent pour le complimenter. Puis, ce furent les petits acheteurs de la région qui s’approchèrent. Jaloux de ce marchand étranger qui gâtait les prix et raflait tout, ils juraient, engeignaient les paysans, laissaient tomber leur bâton sur l’échine des bêtes. Comme il n’y avait plus rien à acheter, ils disaient à Sicot :

— Vous vous êtes fait voler, bonhomme ! Ils valent neuf mille francs et plus vos bœufs… Il y a hausse ; c’est marqué sur les journaux, mais vous ne savez sans doute point lire ?

Il y en eut même un qui ajouta :