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LA PARCELLE 32

L’oncle jeta, de sa petite voix aiguë :

— Mon droit, c’est de manger avant les poules !

Honoré sentit que la discussion allait rebondir. Il ferma son couteau et quitta la table.

L’oncle se leva aussi, après avoir mis dans sa poche le reste de son pain. Puis il sortit sa tabatière ; machinalement, car depuis plusieurs jours, la tabatière était vide. Il l’ouvrit cependant, la secoua sur sa main, y plongea le nez…, il n’y avait plus rien, à peine une vague odeur.

Alors il dit tristement, avec un soupir :

— Tu devrais bien aller demander ta cousine de Montverger !

— Vous n’aimez pas mieux que j’aille vous quérir pour quatre sous de tabac ? demanda Honoré.

Le vieux leva ses yeux bordés de rouge.

— Tu sais où il y en a ?

— Non ! mais je sais qu’Armand Mazureau emplit sa tabatière tant qu’il veut, avec de la poussière de bois pourri et du poivre doux.

L’oncle Jules murmura, déçu :

— Tu ferais mieux d’aller chercher celle de Montverger !

Honoré leva la tête. Le portrait de la cousine de Montverger était là, devant lui, sur une photographie qui avait été faite à l’occasion d’un mariage. Elle se tenait en avant d’un groupe, raide en ses beaux atours. Haute comme un homme, avec des épaules carrées, un gros menton et une moustache pâle, elle n’était vraiment pas trop belle. Honoré songea qu’elle était réputée pour sa mauvaise haleine.

— Tu vas aller à la mairie, réclamer notre droit, disait de son côté la vieille servante.