point. C’était son habitude, à elle, de ne pas se trouver dans la maison pendant qu’ils mangeaient. Pour la faire rentrer, il fallait un événement.
Honoré rusa. Courant à la petite table il attrapa une poule et, revenant au seuil, la leva, gloussante et hérissée, au-dessus de sa tête.
Tout de suite, la vieille revint, très inquiète. Honoré lâcha la poule et cria :
— Nous n’avons pas de pain ! où donc est le pain ?
Par chance la bonne femme entendit du premier coup.
— Il n’y en a pas ! dit-elle.
Honoré ne put se tenir d’observer :
— Il n’y en a pas pour nous…, il y en a cependant pour vos poules ! Passe pour moi, je m’arrangerai autrement, mais l’oncle Jules ne sera pas content !
La servante entendit très bien ces derniers mots. Elle ferma à demi les yeux, pinça les lèvres et précéda Honoré dans la cuisine. L’oncle attendait ; pour passer le temps, il s’amusait à refaire le fil de son couteau sur le bord de son assiette.
La servante poussa vivement l’attaque.
— Vous ne pouvez pas manger sans me déranger dans mon travail ? dit-elle… Et puis, dites donc ! il n’est pas nécessaire d’abîmer ma vaisselle !… Si vous ne faites rien d’utile tout au long des jours, ne faites pas de sottises au moins !
L’oncle riposta aigrement :
— Si je ne travaillais pas plus qu’une que je connais, la maison serait une maison perdue avant longtemps… Il y en a comme ça dont tout le courage est en paroles…