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LA PARCELLE 32

lement ; il n’avait pas de doutes sur ce point… Mais il ne fallait pas que ce manège se prolongeât longtemps, car la vente n’était pas très éloignéeet, d’un autre côté, le gars pouvait se lasser.

Mazureau, rageusement, se pétrit la mâchoire. Quel imbécile, cet Honoré, qui, avec tous les maîtres atouts dans son jeu, n’en finissait pas de gagner la partie ! Plus tard, quand tout serait réglé, en ordre, sur papier de notaire, avec les signatures au bas des écrits, eh bien ! malgré ses écus, il ne tiendrait pas le haut bout dans la famille, ce méchant tortu à sang pâle !

Des idées confuses assaillirent Mazureau. L’image de sa défunte flotta un instant sur le fond obscur de sa pensée. Il la revit, si douce, si flexible, si fâcheusement étrangère aux calculs d’orgueil et d’intérêt… Pour se marier avec lui, elle avait, en sa jeunesse, refusé un riche gars de Saint-Étienne… Si elle revenait à cette heure, elle serait peut-être à côté d’Éveline, pour l’amour et contre la raison.

Allons donc, Mazureau ! Tu as peiné toute ta vie et usé ton corps et durci ton âme… Tu as été seul dans le droit chemin ; tous les tiens ont été fléchissants et insoucieux d’honneur… Il a fallu tous les redresser… Et parce que tu n’avais point d’aide, tu as semé longtemps en vain… Maintenant voici la récolte et tu jetterais la faucille ! Tu fermerais ta grange, Mazureau, alors que tu peux la remplir jusqu’aux chevrons !

Folie ! déshonneur ! lâcheté !

Lâcheté d’autant plus coupable, qu’il y aura, après toi, quand tu seras couché avec tes anciens dans la terre des Brûlons, qu’il y aura encore un