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lées, on doit cependant prendre garde de ne pas tomber dans cette droiture, comme beaucoup de jeunes gens font, lorſqu’ils veulent graver proprement, parce qu’il leur eſt plus facile de pouſſer des coups de burin peu tournés, que de les conduire ſuivant ces hauteurs & cavités des muſcles, qu’ils n’entendent pas aſſez.

COULER, ſi dit des coups de burin que l’on conduit en ligne aſſez droite, pour former les tailles. On peut couler quelques ſecondes des tailles du côté des ombres, quand on veut repréſenter du poil, des cheveux ou de la barbe, afin de mêler & donner plus d’union avec la chair ; mais il faut que ces tailles ſoient bien déliées. Cette maniere fait un fort bon effet ; car on doit les repréſenter autant qu’il eſt poſſible, par l’effet d’une ſeule taille ; des poils trop comptés ſont durs, particulierement dans les petites figures.

Couler (le) ſe dit auſſi en Peinture des premieres teintes que l’on met ſur les ébauches. Ce couler ſe fortifie enſuite par de nouvelles teintes couchées largement, & bien empâtées.

COULEUR : la Peinture en reconnoît de deux ſortes en général ; la couleur naturelle des objets que le Peintre ſe propoſe d’imiter, ſur ſa toile, & la couleur artificielle, ou celle qui réſulte du mêlange des couleurs de ſa palette. Ce mêlange appliqué ſuivant les régles de la Peinture, s’appelle couleur locale, couleurs rompues, demi-teinte, &c. on les trouvera expliquées à la fin de cet article.

Avant d’entrer dans le détail des couleurs à l’égard de la Peinture, j’ai cru devoir dire quelque choſe de la couleur des objets naturels, & des organes qui la font appercevoir, afin de mettre devant les yeux du Lecteur la raiſon phyſique qui s’oppoſe ſouvent à ce qu’un Peintre devienne bon coloriſte.

Que les objets ſoient en effet colorés, ou qu’ils nous paroiſſent ſeulement tels, je laiſſe ce problême à diſcuter aux Phyſiciens. L’uſage a prévalu de dire qu’on objet eſt de la couleur, dont l’idée eſt excitée en nous par les rayons de lumiere réfléchis par l’objet. Ces rayons agitent les fibres de l’œil, ſuivant leur diſpoſition ; cette agitation modifiée de telle