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cun cherche à imiter la nature, & chacun par différentes voies, prétend arriver à ce but.

On donne des régles pour le deſſein, pour la compoſition : mais peut-on en donner d’autres pour le coloris, que celle d’exhorter les Artiſtes à donner tous leurs ſoins pour imiter les couleurs vraies des objets naturels le plus près qu’il eſt poſſible, toujours cependant ſuivant le dégré d’éloignement & l’effet que produit le plus ou le moins de lumiere dans le lieu où le Peintre les ſuppoſe ?

Cette régle devient inutile pour qui n’a pas l’œil bon, dans le ſens qu’on dit avoir l’oreille bonne, eû égard à la muſique. Il ne ſuffit pas de bien voir, il faut voir bien ; avoir une delicateſſe particuliere par rapport à la beauté, à la vérité, & à la variété des couleurs & de leurs teintes.

Pluſieurs cauſes phyſiques rendent même ſouvent l’œil malade, ſans qu’on le ſoupçonne tel, à cauſe de l’habitude du mal. La différence de l’organiſation de l’œil, fait que les uns voyent mieux les objets qui ſont éloignés, que ceux qui ſont près ; elle produit un effet contraire dans d’autres, & ces différences qui ſont infinies, ne ſont pas ſenſibles à celui qui voit de telle ou de telle maniere, parce que peu inſtruit de ſon organiſation particuliere, & de ce en quoi elle differe des autres, il penſe que tous les hommes voyent comme lui.

Le tempérament y contribue auſſi beaucoup : il faut l’étudier, & s’efforcer de corriger ce qu’il feroit faire infailliblement de défectueux. Un Artiſte bilieux ou mélancholique, tendra naturellement à un coloris jaune, ou verdâtre & plombé, ou tirant ſur le charbon. Le phlegmatique donnera dans un coloris fade, dans le ton de la craye. Le ſanguin anime ſes carnations, les rend vives & brillantes, pourvû que la bîle ne ſe mêle pas de la partie ; elle en terniroit l’éclat par un jaune qui donneroit au coloris un ton de brique. Nous avons un exemple bien ſenſible de l’influence du tempérament actuel ſur le ſens de la vûe : une fille malade de la jauniſſe, voit une partie de cette humeur répandue ſur tous les objets qui l’environnent.

C’eſt donc peu que d’a-