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la guerre des boutons


leur rancune et se montrèrent moins rogues. Mais on se garda à carreau tout de même dans le petit monde des gosses.

Le samedi, comme Bacaillé était sorti, la tension diminua encore ; on leur permit de jouer dans la cour et ils purent, au cours des parties organisées, mêler aux expressions réglementaires du jeu quelques phrases relatives à leur situation, phrases brèves, prudentes et à double entente, car ils se sentaient épiés.

Le dimanche, un peu avant la messe, ils purent se réunir autour de l’abreuvoir et causer enfin de leurs affaires.

Ils virent passer, tenant son père par la main, Bacaillé, entièrement remis et plus narquois que jamais dans ses habits « rappropriés ». Après vêpres, ils crurent habile et prudent de rentrer avant qu’on les y invitât.

Bien leur en prit, en effet, car ce dernier trait désarma tout à fait les parents et le maître si bien que, le lundi, on les laissa libres de jouer et de bavarder comme avant la sauce, ce qu’ils ne manquèrent pas de faire à quatre heures, loin des oreilles inquisitoriales et des regards malintentionnés.

Mais le mardi, tous eurent une grosse émotion : Grangibus arriva à l’école avec son frère, et Gambette lui aussi descendit de la Côte avant huit heures. Il apportait au père Simon un chiffon de papier