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la guerre des boutons


mulant entre toile et cuir des objets hétéroclites qu’il eût été fort ennuyeux de laisser voir aux passants.

Et le soir, lentement, très lentement, Lebrac arriva par le chemin de derrière au carrefour du vieux tilleul. Il avait la jambe gauche raide lui aussi et semblait boiter.

– « Tu t’as fais mal ? » interrogea Tintin.

– « T’as tombé ? » reprit La Crique.

Le général sourit du sourire mystérieux de Bas de Cuir, ou d’un autre, d’un sourire qui disait à ses hommes : vous n’y êtes point.

Et il continua à bancaler jusqu’à ce qu’ils fussent tous entièrement dissimulés derrière les haies vives du chemin de la Saute. Alors il s’arrêta, déboutonna sa culotte, saisit contre sa peau la hache à main qu’il avait promis d’apporter et dont le manche enfilé dans une de ses jambes de pantalon donnait à sa démarche cette roideur claudicante et disgracieuse. Ce fait, il se reboutonna et, pour montrer aux amis qu’il était aussi ingambe que n’importe lequel d’entre eux, il entama, brandissant sa hachette au centre de la bande, une sorte de danse du scalp qui n’aurait pas été déplacée au milieu d’un chapitre du « Dernier des Mohicans » ou du « Coureur des Bois ».

Tout le monde avait ses outils : on allait s’y mettre. Deux sentinelles toutefois furent postées au