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dilué en partie son désespoir dans le besoin de l’appétit à satisfaire et le souci de la sécurité. Elle mangea donc aux gâteaux et aux friandises qu’on lui présenta ; elle but dans la tasse l’eau fraîche qu’on lui versa et, de table en table, de chambre en chambre, promena, en sautillant, une douleur qu’abolissait progressivement la curiosité incongrue dont elle était affligée.

Elle examina tout avec un soin qu’on eût dit méticuleux : mais qui pourrait être sûr de savoir sous l’angle de quels besoins elle jugeait des choses ? Il y avait certainement celles qu’on pouvait manger, puis les objets brillants qui l’attiraient, par un sentiment instinctif de malsaine et irrésistible curiosité, enfin la plus grande partie qui ne l’intéressaient que par leur nouveauté et vaguement, selon l’instant, la place qu’ils occupaient et l’utilité toute spéciale qu’elle en tirait momentanément.

Elle affectionna bientôt particulièrement la table d’où lui tombaient les bons morceaux, la table où brillaient les couverts de métal, l’acier des couteaux, les couleurs vives et chaudes des