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Des jours heureux avaient passé sous le soleil ; des jours de bavardage et de goinfrerie, dans les palais verts, compliqués et changeants des taillis, dans les pavillons clairs, soleilleux de la coupe, à côté des geais lourdauds, des merles dégagés et vifs, des corbeaux cyniques et monotones et des grives méprisantes ou peureuses.

Elle connaissait les arbres hospitaliers, les ravins abrités, les sources fraîches, les oiseaux amis, les rivaux et les ennemis.

Elle avait été très surprise de voir des matins entiers les geais passer sur sa forêt, s’abattant tous comme pour une pause prévue, une halte immuable, à un même grand chêne aux branches sèches, comme au point de repère d’une étape bien définie. Elle avait d’abord suivi les premiers, puis, voyant qu’ils dépassaient la forêt et s’enfonçaient vers le midi en longue chaîne grise, les avait abandonnés pour revenir à son point de départ, et huit jours entiers, amusée et curieuse, elle avait escorté, durant leur passage par son domaine, leur monotone et long défilé.