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autour de ses sœurs qui, elles aussi, prenaient leur place dans la forêt, elle s’abandonna joyeuse à la vie, contemplant son sort sous un angle heureux de jeunesse, de lumière et de fête.

Ses sœurs n’étaient pour elle que la société familière aux mœurs connues, aux habitudes communes, le point d’appui sur lequel sa vie personnelle, son égoïsme de bête pouvaient se reposer ; leurs gestes, le critérium indispensable pour juger des autres habitants ailés qui hantaient comme elle les rameaux touffus des futaies forestières. Elle conservait avec elles et avec toute sa gent cette solidarité de race, moins accentuée chez les sédentaires que chez les migrateurs qui sentent bien plus, eux, devant la multiplicité des besoins, la nécessité de s’unir, de s’entraider et de se défendre mutuellement.

Elle n’aurait comme Tiécelin le corbeau porté secours à un compère en train de disputer à un dangereux rapace la proie convoitée. Elle faisait partie des privilégiés de la forêt chez qui les instincts altruistes sont le moins développés, pour l’unique raison que les besoins, ces grands