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vernissée d’une jeune feuille, se réfléchissant dans l’ove au cadre d’or de sa prunelle, allume devant lui un incendie immense, quelque chose comme l’infernal bûcher où doivent brûler aussi longtemps que les chasses sans fin les âmes innocentes des pauvres lièvres…

Le jeune crépuscule le tire enfin de cette torpeur pénible. Il s’éveille. Il écoute. L’heure est calme. Les feuilles, au faîte des futaies, s’agitent doucement dans la brise du soir comme des mouchoirs d’espérance, adieu de l’âme des arbres au jour qui s’en va. Et Roussard d’un seul bond franchit le mur d’enceinte du bois, son fossé humide jonché de pierres moussues et de feuilles pourries.

Une quiétude parfumée émane de la fraîcheur des prés ; l’heure est douce et semble lui sourire pour lui rendre en partie une confiance ébranlée par les noirs pressentiments qui le troublent. Il oublie. Les choses sont là accueillantes et douces, les trèfles au loin ont une odeur de miel. Déjà il cabriole parmi les jaunes lupullines et les sainfoins purpurins, heureux de sa solitude, quand, d’un seul coup et de tous côtés