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de juin, il descendait vers ses lieux de sortie familiers, après avoir comme sondé l’espace, pour découvrir, malgré le calme inviolé de la forêt, la direction du vent très faible qui baisait languissamment les feuilles ardentes des arbres. Le vent soufflait du Sud, et il se dirigea vers la brèche du mur d’enceinte la plus au midi, comme s’il voulait épier le soir aussi loin que possible et démêler, sur les mille écheveaux de son oreille infaillible, les bruits imperceptibles que pouvait receler l’air nocturne doucement balancé.

En peu d’instants Roussard fut hors du bois, et comme il se sentait protégé par les murailles élastiques de l’ombre, il évolua par son domaine avec le calme et l’aisance que procure la sécurité. Tout en tondant de temps à autre un faisceau d’herbes aromatiques, il se divertissait comme un jeune poulain, ivre de sa solitude, bondissant de touffe en touffe, rasant les haies, et, de temps à autre, tournant vers le village d’où venaient encore quelques bruits fanfarons l’oreille négligente de l’être en fête plein de confiance en la vie.