Page:Pergaud - De Goupil à Margot, 1910.djvu/125

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

loin de son buisson natal, harassé par une fuite éperdue devant une harde féroce, il était venu échouer dans les parages de ce coin paisible. Après de savants doublés et de multiples crochets, il s’était remis entre deux sillons boueux avec lesquels il se confondait, le nez tourné du côté du vent qui, comme un complice ou comme un ami, lui rabattait soigneusement le poil sur l’échine pour le mieux dissimuler. Et toute la nuit et tout le jour qui avaient suivi il n’avait pas bougé.

Au crépuscule seulement, désireux d’abord de reprendre le chemin de son ancien canton, il s’était mis en marche ; mais le dernier lièvre de la combe, tué sans doute par les chasseurs, laissant libre cet admirable séjour, la proximité des champs de trèfle et de luzerne, le calme sauvage de ce coin de bois abrité des grands vents, l’avaient retenu là, et les levrauts de Valrimont devenus adultes, en quête eux aussi de solitude, lui en avaient laissé sans conteste la paisible suzeraineté.

Par des sauts saccadés et prudents, dans la lumière veloutée et caressante de ce crépuscule