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les pointes blanches de ses oreilles rousses, comme un guerrier qui essaie son arme avant la bataille, ou simplement comme un voyageur qui, avant de partir, vérifie la stabilité de sa coiffure.

Puis ses pattes de derrière, longues et solides comme deux ressorts d’acier, élevèrent son gentil cul blanc à la hauteur de ses oreilles et le projetèrent, d’une détente sèche, à quelques pas du fourré de ronces affectionné qu’une vieille expérience, et non la mobilité frivole du caprice, lui avait fait choisir pour sa couchette d’un jour.

Roussard, l’ermite solitaire, l’usufruitier de la Combe aux Mûres, était le seul maître de ce canton de bois et reconnu comme tel par tous les autres lièvres, car, depuis des lunes et des lunes qu’il avait, une nuit d’automne, trouvé la combe déserte et que, sous les espèces de la boue de glaise vernissant ses guêtres rousses, il y avait fixé ses dieux pénates, nul parmi la gent oreillarde, docile aux instincts séculaires, n’avait songé à lui disputer, comme la fabuleuse belette, ce droit de premier occupant.

Peut-être avait-il oublié ce soir d’automne, où,