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nes ; mais un instinct tout puissant la prenait à guetter les ébats amoureux des oiseaux de son bois, leurs poursuites, leurs querelles, leurs combats : c’était son avenir qui se préparait, de fabuleuses ripailles de sang sur un couvert de feuilles parmi la douceur des matins ou la tiédeur des vesprées printanières.

Les bourgeons s’épaississaient, se gonflaient ; bientôt des feuilles délicates et pâles s’en élanceraient victorieuses pour dérouler à la lumière leurs banderoles de fraîcheur et s’étaler ensuite en larges parasols vernis.

Ce serait le moment des nids : presque tous les buissons en recèleraient, les grands arbres en abriteraient eux aussi, et, selon le caprice de l’heure, elle pourrait composer son menu des grêles oisillons de la lisière ou des lourdes couvées de ramiers de la combe.

Maintenant, si durant le jour elle ne pouvait songer à les capturer, du moins presque chaque soir arrivait-elle à saigner un merle.

Dès que tombait le crépuscule, perchés sur les branches basses des arbres de la tranchée,