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Le chien l’évitait, mais par contre, enhardi par les petits mots d’amitié et les caresses du patron, il s’en venait doucement poser son museau sur la cuisse de Lisée, puis de la patte lui grattait le genou en ayant l’air de dire : Hé ! ne m’oublie pas !

Tant qu’on lui donna, il resta ainsi, mais quand le braconnier eut cessé de partager avec lui et lui eut signifié, en se frottant les mains devant son nez, qu’il n’avait plus rien à attendre, il se remit à fureter par tous les coins de la pièce, puis, finalement, s’affaissa sur le ventre et resta tranquille.

On n’y prit garde, mais quand, à la fin du repas, étonné qu’il eût été si calme, la Guélotte se leva pour débarrasser la table, elle constata que le chien, bavant de joie, la gueule tordue, les yeux mi-clos de volupté, tenait entre ses pattes de devant un soulier qu’il mastiquait consciencieusement.

Elle jeta un cri de rage et se précipita sur lui :

— Miséricorde ! Mes souliers du dimanche ! râla-t-elle.

La moitié de l’empeigne était percée comme une écumoire et de petits morceaux manquaient.

— C’est les dents qui le tracassent, essaya de dire Lisée pour l’excuser.