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beau raffût. Tout le village va croire qu’on s’égorge ici.

— Je te défends d’aller le toucher, ordonna Lisée. Tu n’as qu’à le laisser tranquille, il se calmera tout seul. Ce n’est d’ailleurs pas inutile qu’il apprenne que l’on ne fait pas toujours tout ce qu’on veut dans la vie, et puis, de gueuler un peu, ça lui fera la voix.

Miraut, seul, ne se consola pas vite. Devant la porte close il continua à brailler et hurla jusqu’à la grande fatigue. De temps à autre, il s’arrêtait et écoutait, pensant que ce n’était peut-être qu’une farce qu’on lui jouait, et qu’on allait revenir le délivrer.

Mais quand il entendit le martèlement des souliers de Lisée frappant la terre battue du chemin, il comprit que c’était pour tout de bon qu’on l’emprisonnait. Une rage folle s’empara de lui, il sauta contre la porte qu’il mordit de tout son cœur et essaya même d’atteindre la fenêtre afin de s’évader, coûte que coûte.

Quand tout bruit et tout espoir de retour se furent évanouis, il jappa encore longtemps, longtemps, et sa voix avait des inflexions tantôt de douleur puérile, tantôt de colère furibonde, tantôt de rancune farouche ; puis, fatigué et dolent, il revint à sa botte de paille, l’écarta un peu des quatre pieds pour faire un creux, tourna