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que Lisée, pour la centième fois de la journée, expliquait à son ami, le cordonnier Julot, la généalogie de son chien et ne prêtait guère attention à la querelle quand la Bellone, à laquelle on ne pensait point, et qui, ayant terminé sa petite ronde, rejoignait Lisée, pressentant qu’il allait au bois, se trouva là, juste à point, pour empêcher un abus de force aussi traître que peu chevaleresque du roquet.

Grondante, le poil du dos en brosse, les dents prêtes à l’attaque, elle se jeta tout à coup devant Miraut, coupant l’élan de Souris, le défiant de sa puissante mâchoire, puis, prenant à son tour l’offensive, se précipita sur l’insulteur et lui pinça vigoureusement le derrière.

L’autre n’attendit point son reste, et, hurlant, décampa à toute allure, poursuivi par la chienne qui lui serrait toujours durement la peau, tandis que tous les voisins se retournaient, surpris et interloqués de cette intervention si spontanée et si inattendue.

Miraut, reconnaissant, vint lécher les babines de sa protectrice qui, calme et digne, se laissa remercier, assise sur son derrière, l’œil encore tout plein d’éclairs de colère et le fouet frémissant.

— Hein ! tu vois, constata Lisée ; elle sent déjà que ce sera un crâne chien, un bon camarade