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de mal finir et que ces êtres-là, ça n’était que des bêtes à chagrin.

Cependant Miraut, affamé, crotté, apeuré et tremblant, errait craintif au hasard des champs, des prés et des buissons, aux abords des villages inconnus dont il redoutait les populations plus inconnues encore, sans doute dangereuses, perfides et méchantes. Il ne pensait plus qu’à son estomac qui criait la faim, oubliant tout, ne se rappelant peut-être même plus Lisée et sa maison, ne songeant plus à rechercher le chemin bien perdu de Longeverne, aboli ou effacé dans sa mémoire.

Enfin un beau matin, épuisé, rejeté de partout, n’ayant rien absorbé depuis de longues heures et crotté au point de n’avoir plus, par tout le corps, un poil de propre, le long de la route, à l’entrée d’un village, il eut comme une vision suprême de tout ce qui avait fait son passé : il se souvint de son maître Lisée qu’il n’avait pu rejoindre et qu’il ne reverrait jamais plus sans doute et il se mit à hurler désespérément au perdu.

Assis sur son derrière, l’air minable et désolé, il tendait le nez vers le ciel et poussait un cri, un hurlement long, très long, tragiquement long qui finissait comme un sanglot.

À ce cri de désolation, à ce signal lugubre,